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LES LIONS INDOMPTABLES ONT UN NOUVEL ENTRAINEUR SELECTIONNEUR: C’EST LA NORME

Le Ministre des Sports et de l’Education Physique a mis à la disposition de la Fédération Camerounaise de Football, un entraineur sélectionneur pour les Lions Indomptables de football masculin. La Fédération Camerounaise de Football rejette cette nomination et une controverse enflamme  l’opinion publique. Nombreux sont ceux qui pensent que le Ministre des sports camerounais a agi en violation des lois statuant sur le fonctionnement des fédérations sportives et notamment la Fédération Camerounaise de Football. Quelques-uns estiment que, si le Ministre a agi dans le cadre de ses prérogatives, celui-ci a violé la loi en ce qui concerne la nomination du coordonnateur des équipes nationales de football, qui est de la seule compétence de la Fédération Camerounaise de Football. Dans tous les cas, l’idée d’une violation des textes réglementaires dans la prise d’acte du Ministre en nommant un entraineur national pour les lions indomptables, un coordonnateur des équipes nationales et certains membres dans l’encadrement technique de l’équipe nationale, est dans l’écrasante majorité des esprits des camerounais. L’observation que nous pouvons faire avant de nous prononcer sur une violation ou non, des textes qui encadrent le football au Cameroun est que, la quasi-totalité de ceux qui s’offusquent de l’acte du Ministre des Sports, ont une posture plus ou moins fanatique, et non pas véritablement celle des personnes avisées. D’autres, s’inscrivant presque dans le même sillage, ont tendance à être nuancé dans leur prise de position contre l’action du Ministre. Ils évoquent notamment deux textes, le décret de 2014 et la convention signée entre le ministère des sports et la Fédération Camerounaise de Football. Pour eux, si ladite convention autorise le Ministre des Sports à nommer les entraineurs, la loi de 2014 quant à elle est formelle, la nomination d’un entraineur de l’équipe nationale de football est de la seule compétence de la fédération camerounaise de football.  Plutôt que de trancher, l’important est de signaler que le problème que soulève cette question est profond. Quelques éléments de droit permettent une meilleure appréhension de la question. Mais avant de s’engager dans l’analyse, mention doit être faite de ce que, les seules conventions et décrets de 2014, ne suffisent pas pour comprendre le problème. Un troisième texte est nécessaire, et il s’agit du décret de 2005, portant création du Ministère de l’Education physique. Ces deux décrets semblent être en contradiction et poseraient le problème juridique, de conflit entre les lois, dans le cadre de leur application. Il faudrait peut-être relever que, c’est cette contradiction apparente, qui a suscité des mesures contractuelles, prises entre le Ministère des Sports et la Fédération Camerounaise de Football. En tout état de cause, le droit apporte une solution efficace aux conflits des lois, sous le prisme de la hiérarchisation des normes juridiques d’une part et de l’autre, l’application de la loi dans le temps. Dans ce dernier cas, la loi nouvelle vient suivant les cas, en abrogation de la loi ancienne et elle s’applique pour l’avenir. Elle ne s’aurait s’appliquer sur des cas antérieurs à elle, d’où la notion de non rétroactivité de la loi. Pour ce qui est de la hiérarchisation des normes juridiques, en droit interne, la loi constitutionnelle est au-dessus de la pyramide, ensuite vient la loi issue du parlement, puis le décret et enfin l’arrêté. On a d’autres mesures que sont les circulaires, les directives. Cette classification implique que, une mesure légale dont l’émanation est du parlement, ne soit pas contraire à la constitution, qu’un décret ne doit pas être pris en contradiction avec la loi, que l’arrêté ne doit pas être aux antipodes du décret, de même que la circulaire pour l’arrêté. Très souvent au Cameroun, on a vu des arrêtés pris en contradiction totale avec les décrets pris par le président de la république, ou des lois émanant du parlement. Nous ne nous attardons pas sur cette question, qui pourrait être une des causes de la confusion en territoire camerounais, des lois qui devraient s’appliquer sur un certain nombre de questions, écartelées entre plusieurs textes de lois. La question de l’application d’une norme internationale ne se pose pas lorsque cette norme a été régulièrement ratifiée par le parlement, qui lui confère la valeur d’une loi. Dans le cas qui nous concerne, nous avons un décret de 2005 et un décret de 2014. Il est tentant de dire que le décret de 2014 s’applique au cas d’espèce, c’est-à-dire sur la question de la désignation d’un entraineur des lions indomptables par le Ministre des Sports en lieu et place du président de la Fédération Camerounaise de Football. Le décret de 2005 portant organisation et fonctionnement du Ministère des Sports et de l’Education Physique dispose en son article 2  que : «  le Ministre des Sports et de l’éducation physique a pour mission, l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation continue de la politique des sports et de l’éducation physique » cette disposition apparait vague pour certains observateurs, qui risquent de perdre de vue que, le législateur de 2005 confie au Ministère des sports la totalité des compétences en  ce qui concerne le sport au Cameroun. A ce propos, il appartient au Ministère d’élaborer la stratégie des sports et de la mettre en œuvre. Pour mieux cerner l’impact de cette réalité, l’article 25 du décret de 2005 dispose que : « la sous-direction de la préparation et du suivi des sports de haut niveau, est chargée de la gestion des encadreurs et des sportifs de la filière de haut niveau » plus loin dans le cadre de l’article 27, «  le chef service du suivi des sports et encadreurs de hauts niveau, est chargé de l’actualisation de la liste des sportifs et encadreurs de haut niveau, et du suivi du développement de leur carrières sportives » ces deux dispositions sont claires. Le Ministère des sports est à la fois, celui qui recrute les entraineurs et qui sélectionne les joueurs dans le cadre du renouvellement ou de l’actualisation des listes des joueurs. Pour mieux comprendre la force et la superpuissance de ce Ministère sur la Fédération Camerounaise de Football, une précision me semble nécessaire. Entre le Ministère des sports et la Fédération Camerounaise de Football, il n’y a pas un multicentrisme décisionnel, observable au sens de l’analyse du droit. Les rapports entre les deux entités sont proches du régime du pouvoir hiérarchique. Il y a une décentralisation qui organise les rapports entre les deux institutions certes, mais cette décentralisation est opposée à la décentralisation administrative qui, elle, obéit à l’autonomie des entités infraétatiques, et à la multipolarité des décisions. Entre la Fédération Camerounaise de Football et le Ministère des Sports, il existe une décentralisation fonctionnelle, traduite par le régime de spécialité où la Fécafoot gère un domaine spécifique celui du football. Dans ce cadre, elle n’a pas les coudées franches, elle obéit dans une certaine mesure aux ordres. Les pressions internationales, celles des multinationales comme la Fédération Internationale de Football Association, ont voulu une certaine liberté d’expression pour les fédérations nationales de football. Si ces objectifs ne sont pas totalement atteints, cette pression a abouti à des variables concessionnelles au sein des Etats, où ces derniers donnent la possibilité aux fédérations nationales, de gérer certaines questions relatives au football par des mécanismes d’octroi des agréments. Mais il reste constant que, les Etats n’ont de cesse de revendiquer leur souveraineté sur des questions de sport. La question est celle de savoir pourquoi le décret de 2014 précise-t-il en son article 3(1) que : « La gestion administrative, sportive et technique des sélections nationales de football relève de la compétence de la Fédération Camerounaise de Football ci-après dénommée FECAFOOT ». Répondre à cette question, mention doit être faite du caractère de cette loi en rapport avec le décret de 2005 cité supra. La loi de 2014 a un caractère spécial en rapport avec celle de 2005, qui a un caractère général. Dans cette condition, la loi de 2014, n’abroge pas celle de 2005. Elle vient résoudre une situation particulière concernant le rapport de la Fécafoot à l’équipe nationale de football. D’ailleurs, l’imprécision de ce texte de loi, dont la vocation est de créer une exception dans l’application de la loi de 2005, va engendrer une autre au caractère interprétatif. Il s’agit de la convention de 2015, signée entre la Fédération Camerounaise de Football et le Ministère des Sports et de l’Education Physique. Cette convention vient donc préciser le sens presqu’ambigu des termes du décret de 2014. Pour conclure, le Ministre camerounais des sports n’a pas violé la loi en procédant à la nomination des membres de l’encadrement des Lions Indomptables de Football. Toutefois, ce qu’on peut retenir de la controverse née dans l’opinion publique autour de cette question, est qu’elle nous permet de mettre en lumière, les batailles engagées contre la souveraineté des Etats, sur des questions que ces derniers considèrent comme relevant de leur entière compétence d’une part et d’autre part, l’instrumentalisation des instruments juridiques par ces Etats, pour garder le contrôle sur des domaines qu’ils considèrent comme étant des questions souveraines.

Tobie Atangana    

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Written by tobie atangana

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